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Investment Institute
Vues de marché

Edito Avril - Dégâts persistants

Points clés

Les concessions américaines après le « jour de la libération » laissent encore un choc massif sur les droits de douane américains. À moins que les négociations n'aboutissent rapidement, nous devrions frôler la récession aux États-Unis dans le courant de l'année
D. Trump est revenu sur ses attaques contre la Fed, mais le nouveau style de gouvernement à Washington érode le statut du dollar américain en tant que monnaie de réserve dominante
L’allocation vers les actifs américains menacée
Des primes de risque plus élevées sont nécessaires
Le dollar US pourrait reculer davantage

Le mal est fait

Esquisser des scénarios quantifiés est un exercice vain compte tenu de l'environnement politique très volatil aux Etats-Unis. Nous pouvons toutefois adapter notre évaluation de l'impact macroéconomique de la politique commerciale américaine aux dernières nouvelles. Les concessions temporaires du 9 avril ont modifié la répartition du choc pour le reste du monde (moins de droits de douane pour presque tout le monde, mais beaucoup plus pour la Chine), mais même en tenant compte du sursis accordé aux produits électroniques chinois (également temporaire, du moins en principe), la moyenne pondérée des droits de douane aux Etats-Unis au début du mois de mai s'élève à 25%, soit 10 fois le niveau « pré-Trump ».

Compte tenu de la part de la consommation américaine directement ou indirectement liée aux importations, cela se traduirait, au premier tour, par un choc d'environ 2% sur l'indice des prix à la consommation (IPC). Certes, les consommateurs américains bénéficieront d'une baisse des prix du pétrole – réaction habituelle lorsque le marché anticipe un ralentissement de la demande mondiale – mais celle-ci sera probablement compensée par la dépréciation du dollar. Nous continuons à penser qu'à moins d'une issue, rapide et très positive, des négociations commerciales, les Etats-Unis frôleront la récession au second semestre 2025 (2H 2025).

La prise de conscience des dégâts – à un moment où les sondages sont en chute libre – devrait entraîner d'autres inflexions de positions de la Maison Blanche dans les mois à venir. Nous pensons que les droits de douane définitifs seront inférieurs à ceux annoncés en avril, et les bruits concernant les négociations commerciales sont bien sûr les bienvenus. Cependant, l'incertitude pure et simple, à moins que les négociations ne se résolvent très rapidement, pèsera sur les dépenses d'investissement des entreprises, les conditions financières et la consommation.

En effet, « l’indice d'incertitude de la politique commerciale » a grimpé en flèche. Ceci est cohérent avec un triplement de l'impact de l'incertitude sur les investissements des entreprises estimé par Matteo Lacoviello de la Réserve fédérale (Fed) pendant la première guerre commerciale de 2018-2019, ce qui entraînerait une réduction des investissements des entreprises de 3 à 6% par rapport à la situation de référence. La détérioration de la confiance des consommateurs se poursuit à plein régime. Si l'on examine la composante « attentes » de l'enquête de l'Université du Michigan, il est frappant de constater que même les répondants à tendance républicaine font état d'une baisse de leur niveau de confiance – même s'il reste légèrement supérieur à sa moyenne à long terme. La chute de la confiance des indépendants est très similaire à celle des démocrates. La perte d'optimisme est désormais généralisée.

Le marché s'attend à des réductions de taux significatives de la part de la Fed d'ici la fin de l'année, ce qui se reflète dans la baisse des rendements à deux ans qui, avec l'élargissement des écarts de taux des entreprises, suggère que les investisseurs prennent au sérieux les risques d'une récession aux Etats-Unis déclenchée par la nouvelle guerre commerciale. Toutefois, les rendements des bons du Trésor à long terme ont bien résisté. Cette pentification contre-intuitive de la courbe des taux américaine en période de pré-récession suggère fortement l'émergence d'une prime de risque substantielle sur les obligations d'Etat. Des questions de nature technique, par exemple la part croissante de bons du Trésor américain détenus par des fonds spéculatifs dans le cadre d'opération d’arbitrage ont amplifié la tension sur la partie longue de la courbe en déclenchant des fluctuations contre-productives de la liquidité du marché, mais la cause profonde se situe en dehors de la « plomberie » du système financier américain. Les anticipations d'une nouvelle dérive des déficits budgétaires jouent probablement un rôle, mais les doutes sur l'indépendance future de la Fed et, par conséquent, sur la possibilité de voir le choc des prix, normalement ponctuel, se transformer en inflation persistante, sont, à notre avis, prépondérants.

Le fait que le président Trump soit revenu sur ses propos antérieurs concernant le « licenciement » de J. Powell de la Fed a quelque peu calmé le marché, mais nous ne pensons pas que la question soit réglée. Avant les vacances d'été, la Cour suprême pourrait rendre sa décision sur le licenciement de dirigeants dans d'autres agences fédérales indépendantes, ce qui pourrait avoir des conséquences cruciales pour la Fed. Si la Cour ouvre la porte aux renvois pour cause de désaccord politique – ce qui n'est plus possible depuis 1935 – le simple risque que des conflits politiques puissent conduire à un changement de direction entamerait l'indépendance de la banque centrale, même si le président n'utilise pas effectivement cette faculté. Toutefois, si la Cour confirme le niveau élevé de protection dont bénéficient les dirigeants de la Fed, l'influence exercée par les nominations dans le cadre usuel devrait avoir des implications moins radicales : outre J. Powell, un seul autre membre du conseil des gouverneurs doit être remplacé d'ici à la fin 2028. Le comité serait toujours dominé par les « anciens » gouverneurs et les présidents des Fed régionales – qui ne sont pas nommés par le président. Indépendamment de la décision de la Cour, on observe aux Etats-Unis une évolution de la conception du gouvernement. Le débat entre « grand » et « petit » gouvernement cède la place à un gouvernement “libre” contre un gouvernement « contraint », ce qui a des conséquences sur la prévisibilité des politiques aux Etats-Unis et le statut de principal émetteur d'actifs sans risque dans le monde.

Les investisseurs s'étaient habitués à une machine politique lente et relativement prévisible aux Etats-Unis, avec un grand nombre de limites au sein même de la branche exécutive. Une banque centrale indépendante constitue une limite naturelle aux réorientations budgétaires excessives et aux politiques non-soutenables économiquement. Du point de vue de l'administration actuelle, cette configuration mène à la paralysie, à un moment où la concurrence avec la Chine exige un pouvoir exécutif plus agile. Cependant, le coût d'un tel « gouvernement libre », avec une forte capacitée d'action présidentielle, est un « gouvernement sans contrainte », avec des changements et des signaux politiques plus radicaux. L'administration américaine aura de nombreuses occasions de modérer son ton et de revenir à une politique plus traditionnelle, mais avant d'en arriver là, nous pensons que des dommages tangibles sur l'économie américaine – et par conséquent sur l'économie mondiale – devront se matérialiser.


Plus bas pour l'instant ou plus bas pour de bon ?

Il n'est pas encore clair si nous vivons un changement temporaire ou plus permanent dans la façon dont les investisseurs mondiaux considèrent les Etats-Unis. Il est clair que les préférences ont été affectées par la position plus conflictuelle du président Donald Trump à l'égard des alliances politiques et commerciales. La baisse générale de la valeur du dollar américain cette année suggère que cela a eu un impact sur les allocations d'actifs. Toutefois, il n'est pas certain que les portefeuilles d'investissement mondiaux passent à une allocation durablement plus faible en actifs libellés en dollars américains.

Pour les investisseurs « benchmarkés », le poids des actifs américains dans les indices mondiaux d'actions et d'obligations rend difficile une réduction substantielle de l'exposition dans le cadre des limites de risque existantes. Le poids des actions américaines dans l'indice MSCI World, par exemple, est de 72%. Les sept valeurs technologiques américaines dites « Magnificent Seven » représentent 20% de cet indice. En ce qui concerne les titres à revenu fixe, les Etats-Unis représentent 54% de l'indice ICE Global Bond Market. Le dollar est la monnaie de réserve mondiale et, en raison du déficit commercial des Etats-Unis, le reste du monde est « long dollar ». Il est peu probable que l'on assiste à une réduction substantielle de la pondération des actifs américains. Cependant, le fait même que les actifs américains représentent des pondérations aussi importantes et que le reste du monde est « long » crée la possibilité que des réductions, même modestes, des allocations aient des effets importants sur la fixation des prix du marché.


Les risques du marché américain

Il est prudent de prendre le temps de comprendre les risques liés au rôle des Etats-Unis sur les marchés financiers mondiaux. Le dollar américain est la monnaie de réserve ; le marché du Trésor est le plus grand marché obligataire du monde ; et les actions américaines ont fourni les meilleurs rendements – et ont financé les plus grandes avancées technologiques que le monde ait connues. Toutefois, certains affirment que les Etats-Unis ont souffert du fait que le reste du monde a profité de leur énorme marché de consommation et qu'ils sont la destination de l'épargne étrangère. L'administration Trump souhaite réduire le déficit commercial et utilise les droits de douane comme principal outil pour y parvenir. Pour les besoins de l'argumentation, imaginons que le déficit commercial diminue. Dans le cadre de l'identité de la balance des paiements, cela s'accompagnerait d'une baisse de l'excédent du compte de capital. En d'autres termes, les entrées nettes dans les obligations et les actions américaines diminueraient. Davantage de capitaux mondiaux resteraient dans les pays qui étaient historiquement fournisseurs de capitaux aux Etats-Unis, et il y aurait un rééquilibrage naturel des allocations d'actifs, les Etats-Unis diminuant et les allocations vers les marchés européens, asiatiques et émergents augmentant en conséquence.

Un tel processus est peu probable. Les déficits commerciaux ne reflètent pas seulement le régime tarifaire en vigueur. Ils représentent des différences dans les avantages compétitifs et les soldes relatifs d'épargne et d'investissement. L'utilisation d'un instrument brutal comme les droits de douane pour réduire le déficit a peu de chances de réussir et perturbera la croissance mondiale, l'inflation et les chaînes d'approvisionnement. Et cette approche perturbatrice, qui a un caractère politiquement antagoniste, peut conduire à des changements de préférences. C'est ce que nous avons constaté depuis le début de l'année, et la baisse du dollar en est le reflet. Il est certain que les commentaires des marchés financiers, y compris ceux de certains gestionnaires d'actifs, suggèrent que les allocations d'actifs américains sont réduites tant que l'incertitude politique obscurcit les perspectives de l'économie américaine, la stabilité de la politique et l'évaluation appropriée des actifs américains.


Compétition

Ces inquiétudes pourraient finalement s'estomper et l'orthodoxie politique pourrait être rétablie. Une période d'allocation réduite aux actifs américains pourrait être un bon choix pour les investisseurs mondiaux. Après tout, les actions américaines ont été relativement chères pendant un certain temps et ont surperformé. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à un potentiel de hausse des marchés européens, compte tenu de la réorientation des priorités en matière de dépenses vers la sécurité et les infrastructures. En outre, l'hégémonie que les entreprises américaines semblaient détenir dans le domaine de l'intelligence artificielle a été remise en question par de nouveaux développeurs en Europe et en Asie. L'impasse politique de l'administration américaine avec la Chine limite les activités des entreprises technologiques américaines dans ce pays et incite les concurrents chinois à se développer rapidement.

En ce qui concerne les revenus fixes, les rendements des bons du Trésor n'ont pas beaucoup changé depuis le début de l'année. En revanche, la volatilité est plus élevée. L'indice MOVE de la Bank of America, qui mesure la volatilité des options sur les obligations du Trésor américain, a atteint son plus haut niveau depuis que la Réserve fédérale (Fed) a entamé son cycle de resserrement au début de l'année 2023. Les investisseurs en obligations du Trésor américain doivent faire face à des risques réels et perçus. Il s'agit notamment de la hausse de l'inflation américaine résultant des droits de douane, des pressions politiques potentielles sur la Fed, de la détérioration des perspectives budgétaires et de la menace d'une réduction des avoirs en bons du Trésor par d'autres investisseurs étrangers. Bien que nous ne prévoyions pas que la Chine accélère rapidement la réduction de ses avoirs en bons du Trésor, Pékin a les cartes en main pour menacer de le faire. Pour d'autres investisseurs, détenir leurs capitaux sur les marchés obligataires de leur propre monnaie pourrait être une option plus sûre. En Europe, les capitaux nationaux seront de plus en plus sollicités pour financer l'augmentation des émissions d'obligations nécessaires pour stimuler la croissance et la sécurité européennes.


Il n'est pas facile d'être haussier sur le dollar

L'annonce de la mort du dollar est prématurée. Le monde continuera à détenir des actifs en dollars et il n'existe pas d'alternative viable à court terme au billet vert en tant que monnaie de réserve. Un changement de régime qui verrait l'euro ou le renminbi être utilisé plus largement dans les échanges et les investissements internationaux ne se produira pas du jour au lendemain, même si, à long terme, un système monétaire mondial plus équilibré émerge. Cependant, le besoin permanent de capitaux étrangers pour financer le déficit américain dans un contexte d'incertitude politique, de belligérance politique et de dynamique budgétaire de plus en plus instable signifie que des primes de risque plus élevées sur les actifs américains – et une valeur encore plus faible pour le dollar – seront probablement nécessaires.

Les Etats-Unis abritent des entreprises de premier plan au niveau mondial. Les investissements dans la technologie, les centres de données et la production d'énergie renouvelable resteront importants. Ce sont ces secteurs – et non un retour mythique de l'industrie manufacturière – qui génèreront le meilleur rendement du capital et soutiendront les performances supérieures des Etats-Unis en matière de productivité. Mais les dernières semaines ont changé le monde. Le reste du monde réagit à des Etats-Unis moins coopératifs et les investisseurs doivent adapter leurs portefeuilles en conséquence. Le sentiment et les facteurs techniques ont déterminé les mouvements récents du marché, mais les tendances macroéconomiques et les valorisations détermineront les décisions futures en matière d'allocation d'actifs. À cet égard, le tableau de bord des Etats-Unis ne semble pas particulièrement bon dans un avenir prévisible.

Et des risques subsistent. Donald Trump a renoncé à sa position la plus extrême sur les droits de douane et a atténué ses commentaires sur le président de la Fed, Jerome Powell. Mais son imprévisibilité et sa tendance à recourir à des positions rhétoriques extrêmes en matière de politique économique pourraient à nouveau entraîner des réactions négatives sur les marchés. Si la croissance mondiale va être plus faible, comme la plupart des prévisionnistes s'accordent à le dire, les rendements des investissements risquent d'être plus faibles au cours des deux prochaines années. Dans ces conditions, il est essentiel d'atténuer les risques. D'un point de vue macroéconomique mondial, les Etats-Unis sont la source de risques majeurs.

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