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Edito Septembre - Randonnée sur le plateau

  • 27 septembre 2023 (10 minutes)

Points clé

  • Toutes les banques centrales occidentales ont atteint le point de restriction monétaire maximal ou presque. Elles vont maintenant chercher à garder des conditions restrictives pendant suffisamment longtemps pour assurer un reflux de l’inflation.
  • L’approche “haut pour longtemps” minimise la volatilité macroéconomique relative à « toujours plus haut », mais demeure risquée : l’évaluation en temps réel d’une sur-restriction monétaire reste très délicate.
  • Des taux d'intérêt élevés pendant une période prolongée constituent un défi pour les investisseurs, rendant difficile la surperformance des actifs plus risqués.
  • Toutefois, les rendements obligataires ont atteint des sommets pluriannuels impliquant que les marchés des titres à revenu fixe devraient offrir des rendements réels positifs sur un horizon pluriannuel

Des discours convergents

La Réserve fédérale (Fed), la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque d'Angleterre (BoE) partagent désormais le même discours, qu'elles aient ou non procédé à un relèvement de taux en septembre. Elles considèrent toutes qu'elles ont atteint ou sont proches du pic pour leur taux directeur, bien qu'elles maintiennent toutes un biais haussier, et sont toutes raisonnablement confiantes dans le fait que le resserrement cumulatif finira par « faire l'affaire » et ramener l'inflation à l'objectif rapidement. Leur principal enjeu de communication dans les mois à venir sera d'empêcher les marchés d'envisager des réductions de taux trop précoces, car le maintien de conditions financières strictes – y compris des taux d'intérêt à long terme – fait probablement partie de l'ensemble des mesures qu'elles jugent nécessaires pour permettre un atterrissage de l'inflation à leur cible.

L'économiste en chef de la BoE, Huw Pill, a proposé une image géophysique pour l'approche "taux d’intérêt haut pour longtemps » de la politique monétaire, susceptible de s'imposer : « Moins de Cervin et plus de Table Mountain ». Le choix d'une approche de type « Table Mountain » – c'est-à-dire s'abstenir d'ajouter trop de hausses de taux une fois que l'orientation de la politique monétaire est déjà clairement restrictive – devrait réduire les risques de déclencher une récession abrupte qui devrait alors être ensuite compensée par un nombre tout aussi exagéré de baisses de taux – si, par exemple, l'inflation finissait par être inférieure à l'objectif de la banque centrale en raison de la contraction de l'économie réelle.

La réduction de la volatilité macroéconomique présente plusieurs avantages à long terme. Tout d'abord, une récession profonde, même si elle est rapidement combattue par une bonne dose d'assouplissement monétaire, peut déprimer la croissance potentielle en endommageant le capital humain – par exemple, par une perte de compétences – à mesure que le chômage augmente, et en déprimant le stock de capital lorsque les entreprises réduisent trop leurs dépenses d'investissement. Deuxièmement, un « atterrissage en douceur » renforcerait considérablement la crédibilité des banques centrales en démontrant leur capacité à délivrer un « réglage fin » du cycle économique. L'approche « Table Mountain » repose sur la reconnaissance des délais de transmission parfois longs, la politique monétaire devant cesser d'augmenter les taux avant que tous les indicateurs d'inflation n'aient commencé à clignoter au vert.

Pourtant, il n'est pas évident que les banques centrales puissent facilement déceler si elles se sont déjà engagées sans le vouloir dans un sentier douloureux sur le Cervin. En effet, en raison des délais de transmission, la preuve que la politique monétaire est allée trop loin ne peut être recueillie qu'après coup. Le fait que l'économie américaine se soit montrée résistante jusqu'à présent ne signifie pas que les ingrédients d'un atterrissage brutal ne soient pas déjà présents. Nous ne pouvons que constater qu'il est plus probable que la Fed se soit arrêtée à temps en juillet dernier, compte tenu de la solidité de l'économie réelle, que la BCE, qui pourrait être confrontée à une récession très prochainement. On peut cependant comprendre pourquoi la BCE prend ce risque : les signes d'un ralentissement de l'inflation sont plus difficiles à déceler dans la zone euro qu'aux Etats-Unis. C'est d'ailleurs sur ce point que l'Europe et les Etats-Unis diffèrent, au-delà de leur discours commun. L'inflation sous-jacente a reculé plus nettement ces derniers mois aux Etats-Unis, tandis que les progrès sont très limités dans la zone euro, bien que l’activité économique y soit beaucoup plus dégradée. Différentes dynamiques du marché du travail peuvent contribuer à expliquer ce paradoxe. Avec la prédominance des négociations collectives en Europe, la croissance des salaires tend à rattraper l'inflation passée plus longtemps qu'aux Etats-Unis.

Pourtant, même aux Etats-Unis, la banque centrale ne peut se permettre de baisser la garde. L’indice des prix des services hors loyers – sur lequel se concentre la Fed car c'est la composante qui est normalement la plus en phase avec le cycle domestique – pourrait avoir atteint une ligne de résistance légèrement au-dessus de 3% en glissement annuel. A l'avenir, la décélération des loyers et des prix des produits manufacturés – ces derniers étant désormais à peine en territoire positif – devraient être suffisantes pour compenser cette « résistance » et permettre la poursuite de la convergence de l'inflation sous-jacente vers 2%, mais la ré-accélération des prix des services au cours de l'été lorsqu'ils sont mesurés sur une base de trois mois mérite toujours d'être surveillée.

En résumé, la normalisation monétaire des banques centrales est probablement « terminée », mais nous ne comptons pas sur un revirement rapide avant le milieu de l'année prochaine.

Les marchés ont besoin de catalyseurs pour surperformer le rendement monétaire

Le message des banques centrales des marchés développés sur le maintien de taux plus élevés pendant plus de temps (« higher for longer »), a été bien intégré par les marchés. Sur la base de leurs anticipations, la Fed maintiendrait son taux directeur à 5,5% pendant environ 11 mois, horizon à partir duquel une réduction complète des taux de 25 points de base (pdb) est prise en attendue. Il s'agit d'une longue période. Il y a eu peu d'occasions dans le passé où les taux sont restés au plus haut pendant une période aussi longue. La dernière en date remonte à 2006-2007, le plateau a alors duré 15 mois. En ce qui concerne la BCE, il y aura peut-être des révisions d’anticipations à venir. Pour l’heure, le marché estime que la BCE ne bougera pas ses taux pendant neuf mois.

Il s'agit de l'une des deux politiques possibles pour les banquiers centraux dans cette situation où l'inflation est encore bien supérieure à l'objectif fixé. L'autre choix consisterait à augmenter davantage les taux, dès maintenant. Quoi qu'il en soit, la politique monétaire doit rester stricte jusqu'à ce que l'inflation soit beaucoup plus faible. Pour les investisseurs, cela signifie que le rendement monétaire restera une barrière à surpasser. Cela peut également signifier que les fondamentaux des actions et du crédit se détériorent régulièrement. Plus les taux directeurs et les taux du marché resteront élevés, plus l'impact sur les coûts d'emprunt des entreprises sera important, car de plus en plus de refinancements de la dette se feront à des coûts plus élevés.

Compte tenu de la forme des courbes de taux, il sera probablement difficile pour les obligations d'Etat de surpasser les liquidités à court terme, à moins que les marchés n'inversent la récente réévaluation des anticipations de politique monétaire. Les rendements sont à leurs plus hauts niveaux depuis plusieurs années, mais le mantra « higher for longer », comme les arguments selon lesquels les taux d'intérêt d'équilibre sont susceptibles d'être plus élevés que ce que l'on pensait auparavant, ont continué à les pousser à la hausse. Les investisseurs qui ont opté pour des stratégies obligataires à long terme cette année n'ont, pour la plupart, pas réussi à obtenir des rendements positifs.

La hausse des rendements a toutefois amélioré le rapport rendement/risque des obligations. Considérant les benchmarks des pays les mieux notés, une baisse de 100pdb générerait un rendement total (coupon plus gain en capital) bien supérieur à la perte de rendement total qui résulterait inversement d'une hausse de 100 pdb (en supposant une période de détention d'un an). Pour les investisseurs qui sont moins sensibles aux gains et aux pertes liés aux variations des valeurs de marché, les obligations d'Etat à long terme semblent attrayantes si l'on considère que les taux d'intérêt auront commencé à baisser d'ici un an. Le rendement supplémentaire des obligations d'entreprises de bonne qualité rend l'argument encore plus solide. Les obligations de première qualité notées A aux Etats-Unis et en Europe offrent un écart de 120 à 150pdb par rapport aux courbes des taux des emprunts d’Etats.

Pour les investisseurs plus sensibles à la performance, les stratégies de duration courte avec un peu de « spread » de crédit peuvent potentiellement concurrencer les rendements des liquidités. C'est d’ailleurs ce qui s'est produit au cours de l'été. Le crédit à duration courte, comme le haut rendement et certains prêts (« leveraged loans »), a dégagé des rendements légèrement supérieurs à ceux des liquidités. Un atterrissage en douceur avec une détérioration limitée du crédit soutiendrait un tel scenario.

Les perspectives pour les marchés d'actions sont plus difficiles. En dehors des Etats-Unis, certains marchés affichent des valorisations attrayantes. Les marchés du Royaume-Uni, de la zone euro et de l'Asie présentent des valorisations plus intéressantes en termes de multiples de bénéfices et des taux de dividendes plus élevés que les principaux indices boursiers américains. Le Japon a été très favorisé cette année. La moyenne des actions Nikkei 225 a enregistré un rendement de plus de 25%. L'histoire de ce pays est également intéressante. Le Japon connaît enfin une certaine inflation, ce qui favorise le pouvoir de fixation des prix des entreprises, les autorités sont plus proactives dans le traitement de certains problèmes structurels, tels que l'actionnariat croisé, et les tendances géopolitiques lui sont profitable. La diversification de la production de semi-conducteurs au détriment de Taïwan est l'un de ces facteurs. Les entreprises japonaises s'appuient de plus sur des processus de fabrication bien établis pour les nouvelles technologies, au bénéfice notamment des nouvelles générations de véhicules (électronique embarqué et batteries).

A la recherche de la croissance

Les marchés d'actions ont besoin de catalyseurs. Les Etats-Unis ont bénéficié de la mise en service de ChatGPT, qui a déclenché des flux importants vers les actifs liés à l'intelligence artificielle. Pour l'instant, cependant, l'euphorie initiale s'est estompée compte tenu des valorisations élevées et des attentes ambitieuses en matière de bénéfices qu'elle a suscitées. Pour 2024, le consensus prévoit une croissance des bénéfices américains d'environ 12%, après une année de bénéfices négatifs en 2023. Cette prévision est relativement agressive dans le contexte d'une économie qui pourrait encore connaître une croissance du PIB inférieure à son potentiel. Quoi qu'il en soit, les prix des actions américaines sont très élevés.

Les nouvelles concernant la Chine ne se sont pas encore nettement améliorées, mais ce marché pourrait connaître un rebond substantiel dès que les perspectives macroéconomiques globales s'amélioreront. Les marchés boursiers chinois ont évolué sans grande tendance ces derniers temps et n'ont réalisé qu'un rendement global de 4 à 5% sur l'ensemble de l'année. Pour que les performances s'améliorent, il est probablement nécessaire que de nouvelles initiatives politiques soient décidées pour stimuler la croissance et que les tensions entre Pékin et l'Occident s'apaisent – bien que cela puisse être compliqué à l'approche d'une année d'élections aux Etats-Unis. Toutefois, la Chine est l'un des rares grands marchés d'actions à pouvoir bénéficier d'un rebond important en cas de regain de confiance dans l'économie.

Cela ne semble pas devoir être le cas pour l'Europe. La croissance est faible, les indices des directeurs d'achat du secteur manufacturier et du secteur des services sont nettement inférieurs à 50, ce qui indique une contraction. La BCE a reconnu que la croissance s'était ralentie, mais il est peu probable qu'elle relâche sa croisade anti-inflationniste tant que l'inflation ne sera pas beaucoup plus faible. Après avoir été légèrement positifs au début de l'année, la dynamique des bénéfices des principaux marchés européens est redevenue négative. En l'absence de baisses de taux, d'un taux de change de l'euro beaucoup plus faible ou d'une augmentation de la demande d'automobiles et de biens de consommation en Chine, les facteurs de performance des marchés boursiers européens ne sont pas évidents.

Les marchés n'incitent guère les investisseurs à délaisser les liquidités pour prendre davantage de risques. Il est intéressant de constater que la volatilité des actions reste faible, que les niveaux de l'indice des swaps de défaut de crédit sont les plus serrés de l'année et que la volatilité des taux d'intérêt a baissé depuis le printemps. La volatilité est bon marché, les taux d'intérêt sont élevés, les rendements obligataires n'ont jamais été aussi attrayants depuis 15 ans et l'économie mondiale n'est pas en récession. La situation pourrait être pire et, bien que les performances ne soient pas susceptibles de bénéficier des effets directs de la baisse des taux d'intérêt dans un avenir proche, il semble que la configuration actuelle des marchés incite à mettre l'accent sur le revenu et la diversification.

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